Note
de l’auteur
(Walgard, province eurésienne de Farneheim, 1er avril 1002)
Je suis fils du Norsemberland car il y a presque cent cinquante ans de cela, cette province a accueilli mon arrière grand-père comme l’un des siens. Il a embrassé ses valeurs et défendu ses causes, il a versé ses larmes et son sang sur cette terre hostile pour la voir fleurir de mille richesses. Malheureusement, de cet illustre passé, il ne reste maintenant que les vestiges d’une cité autrefois splendide.
Ainsi semblent disparaître ceux qui vont contre le courant. Toute une flottille de bateaux se dirigeant droit vers le bord du monde ne laisse aucun navire s’écarter de la voie qui est choisie par la majorité, même si cette voie les mène droit vers les abysses.
Cette majorité, c’était et c’est encore l’Eurésia dont la situation sociale et économique ne cesse de se détériorer à mesure que sa population vieillissante sombre dans la décadence. Quelle ironie ! Cette grande nation devient inexorablement la victime de l’ogre dévorant qu’elle a elle-même engendré. Le commerce, l’industrie, la consommation, la croissance… autant de maux responsables de sa perte à venir, autant de mots qui expliquent comment des nations orientales en pleine expansion vont ériger leurs civilisations sur les ruines de notre vieux monde.
Pour les fondateurs de la province du Norsemberland, au nord de l’Eurésia, l’issue dramatique du mode de vie occidental était évidente. Selon eux, il était nécessaire de briser le cycle autodestructeur de la croissance. La solution était simple, en refusant l’escalade on échappait aussi au déclin. C’est pourquoi les principes qu’ils édictèrent visaient justement à éviter ces écueils en les anticipant. A la manière des Elfes, ils pensaient qu’il suffisait de gérer les besoins du peuple et les ressources de son environnement de façon à ne jamais tomber dans l’excès. Ce mode de vie raisonné devait permettre de répondre aux attentes de la population sans connaître les hauts et les bas de toute autre civilisation. Selon eux, la croissance engendrait la croissance et par conséquent entraînait des excès et des dégâts environnementaux liés à la surconsommation. Alors, en refusant de mettre le doigt dans l’engrenage, il devait être théoriquement possible de préserver un équilibre bénéfique et un renouvellement réfléchi des générations. C’était là la volonté des premiers seigneurs norses. Hélas leur émancipation connut diverses déconvenues et cette civilisation n’atteignit qu’épisodiquement l’équilibre auquel elle aspirait. Puis, de plus puissants ruinèrent définitivement leurs aspirations.
Malgré ce destin tragique, je suis fier d’être un héritier de ce peuple cosmopolite qui avait choisi de vivre autrement. Cet ouvrage me donne l’opportunité de renouer avec mes origines et de faire honneur à mon ancêtre et à ses amis dont l’histoire est peu connue. Lors de ses aventures, mon aïeul a trouvé beaucoup plus qu’il n’aurait pu l’imaginer, que ce soit à un niveau scientifique ou spirituel, et ceci grâce aux personnages à la dimension légendaire qu’il a pu côtoyer. Aujourd’hui, les événements liés à ces individus paraissent tellement farfelus, teintés de magie et de superstition que les jeunes gens ne prennent pas ces récits au sérieux. Pourtant, demandez aux anciens… eux savent.
A la création du Norsemberland, au printemps 845 de l’Unification eurésienne, le premier dirigeant norse, Galleon le Dyoniséen, s’attacha les services d’un chroniqueur qui avait pour mission de mettre sa vie par écrit. Cette coutume se perpétua tout au long de sa lignée et mon arrière grand-père eut le grand honneur d’être l’un d’entre eux. Sans ces recueils, bon nombre de ces seigneurs du nord resteraient de vagues rumeurs, comme beaucoup d’autres héros oubliés ou censurés par le pouvoir central autoritaire eurésien. La monarchie s’efforça de détruire tous les documents qui contredisaient la version officielle de la libération de l’Eurésia mais les héros ne tombent pas facilement en désuétude dans l’imaginaire collectif et ils continuent de vivre dans les contes oraux que l’on raconte aux enfants, le soir pour les endormir. Ainsi survit Güen, fils du Seigneur Norse Esteban et héros mythique d’une époque pas si lointaine : un seigneur, un guerrier et le plus cher ami que mon défunt ancêtre n’ait jamais eu.
Pour commencer ce récit j’ai choisi de remonter brièvement aux origines de notre continent et cela pour deux simples raisons. Tout d’abord, pour rappeler comment fonctionne la Vie dans son sens le plus large et quel ensemble de forces et de conflits défie sans cesse son équilibre. Ensuite, parce que je crois que tout ce qui arrive maintenant ne fait que découler de notre passé. En effet, malgré une certaine tendance à oublier son Histoire, l’homme ne peut éviter de ressentir son influence car elle fait partie de son héritage et affecte sa perception, sa culture, ses traditions et son éducation. Parfois certains événements nous semblent lointains et sans importance. Par exemple, ce que l’on nomme communément l’Ere Sauvage apparaît maintenant à notre regard contemporain comme un fantasme délirant et irréel. Pourtant, notre planète est belle et bien passée par cette étape considérée comme anarchique et cruelle, même s’il n’est nulle trace d’écrits pour en attester.
Ainsi, le prologue ne fait que relater des événements vrais mais issus de cette période oubliée de notre Histoire. Peu d’entre nous sont familiers de ces faits car les théories sur l’apparition de la vie sont récentes et s’opposent aux explications traditionnelles de la création du monde. Les institutions religieuses en place depuis plusieurs siècles dans notre pays ont exercé leur autorité avec tellement d’efficacité que le peuple ne cherche pas à remettre en question leurs enseignements. Les gens ordinaires prennent tout simplement comme acquises ces informations et ces traditions séculaires, perpétuant ainsi l’obscurantisme dans lequel on les a éduqués.
Les manuscrits, livres, registres et autres documents écrits qui commencèrent à affluer au début de l’Ere de l’Emergence nous permettent de cerner avec plus de précision comment l’espèce humaine en est arrivée à dominer cette planète et comment notre pays fut bâti. Il me semblait important d’expliquer ce cheminement car il permet aussi de mieux comprendre comment tout un ensemble de forces naturelles agit de concert pour créer la vie et la perpétuer. Ainsi, j’espère que le lecteur ne sera pas décontenancé par les phénomènes surprenants auxquels il sera fait référence dans ce mémoire. Cette magie comme on se plaît à nommer certains faits pourtant naturels n’est qu’un mot de plus qui vise à cerner ce que l’humain ne comprend pas. Cette expression va ainsi rejoindre les diablerie, sorcellerie, envoûtement et autre miracle qui ne font que souligner les limites de notre perception.
Nous avons tort de penser qu’il n’y a plus rien à découvrir dans le monde qui nous entoure, cela serait prétentieux de le croire. Et si les solutions aux maux actuels se trouvaient dans notre passé plutôt que dans notre avenir ? Il est important d’apprendre de nos erreurs et la disparition de certains peuples primitifs doit nous servir à ne pas reproduire les mêmes schémas destructeurs.
Avant de commencer ce récit, je vous propose un voyage dans le temps et dans l’Histoire. Nul doute que beaucoup d’entre vous vont partir à la re-découverte de leurs origines et ainsi porter un nouveau regard sur ce qu’ils prenaient pour acquis.
(Walgard, province eurésienne de Farneheim, 1er avril 1002)
Je suis fils du Norsemberland car il y a presque cent cinquante ans de cela, cette province a accueilli mon arrière grand-père comme l’un des siens. Il a embrassé ses valeurs et défendu ses causes, il a versé ses larmes et son sang sur cette terre hostile pour la voir fleurir de mille richesses. Malheureusement, de cet illustre passé, il ne reste maintenant que les vestiges d’une cité autrefois splendide.
Ainsi semblent disparaître ceux qui vont contre le courant. Toute une flottille de bateaux se dirigeant droit vers le bord du monde ne laisse aucun navire s’écarter de la voie qui est choisie par la majorité, même si cette voie les mène droit vers les abysses.
Cette majorité, c’était et c’est encore l’Eurésia dont la situation sociale et économique ne cesse de se détériorer à mesure que sa population vieillissante sombre dans la décadence. Quelle ironie ! Cette grande nation devient inexorablement la victime de l’ogre dévorant qu’elle a elle-même engendré. Le commerce, l’industrie, la consommation, la croissance… autant de maux responsables de sa perte à venir, autant de mots qui expliquent comment des nations orientales en pleine expansion vont ériger leurs civilisations sur les ruines de notre vieux monde.
Pour les fondateurs de la province du Norsemberland, au nord de l’Eurésia, l’issue dramatique du mode de vie occidental était évidente. Selon eux, il était nécessaire de briser le cycle autodestructeur de la croissance. La solution était simple, en refusant l’escalade on échappait aussi au déclin. C’est pourquoi les principes qu’ils édictèrent visaient justement à éviter ces écueils en les anticipant. A la manière des Elfes, ils pensaient qu’il suffisait de gérer les besoins du peuple et les ressources de son environnement de façon à ne jamais tomber dans l’excès. Ce mode de vie raisonné devait permettre de répondre aux attentes de la population sans connaître les hauts et les bas de toute autre civilisation. Selon eux, la croissance engendrait la croissance et par conséquent entraînait des excès et des dégâts environnementaux liés à la surconsommation. Alors, en refusant de mettre le doigt dans l’engrenage, il devait être théoriquement possible de préserver un équilibre bénéfique et un renouvellement réfléchi des générations. C’était là la volonté des premiers seigneurs norses. Hélas leur émancipation connut diverses déconvenues et cette civilisation n’atteignit qu’épisodiquement l’équilibre auquel elle aspirait. Puis, de plus puissants ruinèrent définitivement leurs aspirations.
Malgré ce destin tragique, je suis fier d’être un héritier de ce peuple cosmopolite qui avait choisi de vivre autrement. Cet ouvrage me donne l’opportunité de renouer avec mes origines et de faire honneur à mon ancêtre et à ses amis dont l’histoire est peu connue. Lors de ses aventures, mon aïeul a trouvé beaucoup plus qu’il n’aurait pu l’imaginer, que ce soit à un niveau scientifique ou spirituel, et ceci grâce aux personnages à la dimension légendaire qu’il a pu côtoyer. Aujourd’hui, les événements liés à ces individus paraissent tellement farfelus, teintés de magie et de superstition que les jeunes gens ne prennent pas ces récits au sérieux. Pourtant, demandez aux anciens… eux savent.
A la création du Norsemberland, au printemps 845 de l’Unification eurésienne, le premier dirigeant norse, Galleon le Dyoniséen, s’attacha les services d’un chroniqueur qui avait pour mission de mettre sa vie par écrit. Cette coutume se perpétua tout au long de sa lignée et mon arrière grand-père eut le grand honneur d’être l’un d’entre eux. Sans ces recueils, bon nombre de ces seigneurs du nord resteraient de vagues rumeurs, comme beaucoup d’autres héros oubliés ou censurés par le pouvoir central autoritaire eurésien. La monarchie s’efforça de détruire tous les documents qui contredisaient la version officielle de la libération de l’Eurésia mais les héros ne tombent pas facilement en désuétude dans l’imaginaire collectif et ils continuent de vivre dans les contes oraux que l’on raconte aux enfants, le soir pour les endormir. Ainsi survit Güen, fils du Seigneur Norse Esteban et héros mythique d’une époque pas si lointaine : un seigneur, un guerrier et le plus cher ami que mon défunt ancêtre n’ait jamais eu.
Pour commencer ce récit j’ai choisi de remonter brièvement aux origines de notre continent et cela pour deux simples raisons. Tout d’abord, pour rappeler comment fonctionne la Vie dans son sens le plus large et quel ensemble de forces et de conflits défie sans cesse son équilibre. Ensuite, parce que je crois que tout ce qui arrive maintenant ne fait que découler de notre passé. En effet, malgré une certaine tendance à oublier son Histoire, l’homme ne peut éviter de ressentir son influence car elle fait partie de son héritage et affecte sa perception, sa culture, ses traditions et son éducation. Parfois certains événements nous semblent lointains et sans importance. Par exemple, ce que l’on nomme communément l’Ere Sauvage apparaît maintenant à notre regard contemporain comme un fantasme délirant et irréel. Pourtant, notre planète est belle et bien passée par cette étape considérée comme anarchique et cruelle, même s’il n’est nulle trace d’écrits pour en attester.
Ainsi, le prologue ne fait que relater des événements vrais mais issus de cette période oubliée de notre Histoire. Peu d’entre nous sont familiers de ces faits car les théories sur l’apparition de la vie sont récentes et s’opposent aux explications traditionnelles de la création du monde. Les institutions religieuses en place depuis plusieurs siècles dans notre pays ont exercé leur autorité avec tellement d’efficacité que le peuple ne cherche pas à remettre en question leurs enseignements. Les gens ordinaires prennent tout simplement comme acquises ces informations et ces traditions séculaires, perpétuant ainsi l’obscurantisme dans lequel on les a éduqués.
Les manuscrits, livres, registres et autres documents écrits qui commencèrent à affluer au début de l’Ere de l’Emergence nous permettent de cerner avec plus de précision comment l’espèce humaine en est arrivée à dominer cette planète et comment notre pays fut bâti. Il me semblait important d’expliquer ce cheminement car il permet aussi de mieux comprendre comment tout un ensemble de forces naturelles agit de concert pour créer la vie et la perpétuer. Ainsi, j’espère que le lecteur ne sera pas décontenancé par les phénomènes surprenants auxquels il sera fait référence dans ce mémoire. Cette magie comme on se plaît à nommer certains faits pourtant naturels n’est qu’un mot de plus qui vise à cerner ce que l’humain ne comprend pas. Cette expression va ainsi rejoindre les diablerie, sorcellerie, envoûtement et autre miracle qui ne font que souligner les limites de notre perception.
Nous avons tort de penser qu’il n’y a plus rien à découvrir dans le monde qui nous entoure, cela serait prétentieux de le croire. Et si les solutions aux maux actuels se trouvaient dans notre passé plutôt que dans notre avenir ? Il est important d’apprendre de nos erreurs et la disparition de certains peuples primitifs doit nous servir à ne pas reproduire les mêmes schémas destructeurs.
Avant de commencer ce récit, je vous propose un voyage dans le temps et dans l’Histoire. Nul doute que beaucoup d’entre vous vont partir à la re-découverte de leurs origines et ainsi porter un nouveau regard sur ce qu’ils prenaient pour acquis.